Continuité des parcs

Les élèves de 4ème se sont frottés à un exercice difficile : lire l’incipit d’une nouvelle fantastique de Cortazàr, « Continuité des parcs », et en écrire, en temps limité, une suite cohérente qui intègre 12 mots (imposés!) de la SPM : sibyllin, immarcescible, béotien, ambages, cacochyme, peu ou prou, acmé, coquecigrues, ineffable, callipyge, céruléen.

Le résultat, brillant, montre que ces mots sont devenus familiers…

Le texte du début de la nouvelle de Cortazàr est en bleu, la suite est écrite par une élève de 4ème : Claudia Maury!

Il avait commencé à lire le roman quelques jours auparavant. Il l’abandonna à cause d’affaires urgentes et l’ouvrit de nouveau dans le train, en retournant à sa propriété. Il se laissait lentement intéresser par l’intrigue et le caractère des personnages. Ce soir-là, après avoir écrit une lettre à son fondé de pouvoirs et discuté avec l’intendant une question de métayage, il reprit sa lecture dans la tranquillité du studio, d’où la vue s’étendait sur le parc planté de chênes. Installé dans son fauteuil favori, le dos à la porte pour ne pas être gêné par une irritante possibilité de dérangements divers, il laissait sa main gauche caresser de temps en temps le velours vert. Il se mit à lire les derniers chapitres. Sa mémoire retenait sans effort les noms et l’apparence des héros. L’illusion romanesque le prit presque aussitôt. Il jouissait du plaisir presque pervers de s’éloigner petit à petit, ligne après ligne, de ce qui l’entourait, tout en demeurant conscient que sa tête reposait commodément sur le velours du dossier élevé, que les cigarettes restaient à portée de sa main et qu’au-delà des grandes fenêtres le souffle du crépuscule semblait danser sous les chênes.

Phrase après phrase, absorbé par la sordide alternative où se débattaient les protagonistes, il se laissait prendre aux images qui s’organisaient et acquéraient progressivement couleur et vie. Il fut ainsi témoin de la dernière rencontre dans la cabane parmi la broussaille. La femme entra la première, méfiante. Puis vint l’homme, le visage griffé par les épines d’une branche. La cabane semblait très ancienne, presque immarcescible comme si le vent qui soufflait et les siècles n’avaient aucune prise sur elle. La femme épuisée, ne regarda même pas le visage ensanglanté de son compagnon. Elle se posta près de la fenêtre et observa par une fente étroite du volet, l’air inquiet. L’homme, lui , gardait un calme sibyllin : assis sur un tabouret cacochyme, il ne cessait de fixer la femme : il était à chaque fois surpris par son ineffable beauté, ses yeux céruléens et sa silhouette callipyge.
Rassurée par le calme qu’elle percevait dehors, et étonnée par le silence qui régnait dans la cabane, la femme se retourna et observa enfin son compagnon, longuement : il était à l’acmé de sa force, et pourtant si fragile… Elle se leva, déchira un bout de sa chemise, et nettoya ce visage qu’elle ne pouvait cesser d’adorer.
– Ils n’auront de cesse de nous avoir occis… Tous condamnent, peu ou prou, ma décision de quitter la ville avec toi!
– Ils suivront les traces que nous avons laissées, mais se perdront très vite dans la forêt. Ils ne nous trouverons qu’à la venue des coquecigrues, rassure-toi!
La femme souriait, elle caressa le visage calme de l’homme, quand un bruit terrible fit éclater le volet de la fenêtre.

Au fond de son fauteuil, l’homme sursauta et échappa le livre qui tomba sur ses genoux : il avait cru entendre un bruit sourd, comme un coup de poing frappé au volet de sa chambre…

 

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