L'assassin habite au 21

Les élèves de 5ème se sont frottés à un exercice difficile : lire l’incipit du célèbre roman de Steeman, L’assassin habite au 21, et en écrire, en temps limité, une suite cohérente qui intègre 12 mots (imposés!) de la SPM : sibyllin, immarcescible, béotien, ambages, cacochyme, peu ou prou, acmé, coquecigrues, ineffable, callipyge, céruléen.

Le résultat, brillant, montre que ces mots sont devenus familiers…

Le texte du début de roman de Steeman est en bleu, la suite est écrite par une élève de 5ème : Léa Cousty!

 

Le passant tomba sans un cri, absorbé par le brouillard avant d’avoir touché terre. Sa serviette de maroquine fit floc en giflant le trottoir. Mr. Smith soupira. Il pensait : «Comme c’est facile ! Plus facile encore que la première fois !»
De fait, il n’avait pas éprouvé cette moiteur au creux des mains et ces tiraillements d’estomac qui, l’avant-veille, avaient ralenti son geste de mort.
Les réverbères, allumés depuis le matin, jalonnaient les rues de cocons lumineux, et les rares véhicules roulaient à pas d’homme. Des agents réglant la circulation, on ne distinguait que les gants et le casque blanc, surmontant la tache blême du visage. « Fameux temps pour les assassins ! » ainsi que l’avait dit Mr Smith à Mrs Hobson en sortant de chez lui.
Il retourna le corps du pied, s’agenouilla, prit le poignet de sa victime. Enfin ses mains gantées de caoutchouc noir coururent sur elle comme de diligents nécrophores1.

Dix minutes plus tard, devant le numéro 15 de Rackham Street, quatre hommes entouraient une masse sombre étendue sur le trottoir.L’un d’eux s’agenouilla devant la victime, sa veste trempant dans une flaque d’eau. Il prit le pouls de l’homme à terre et se releva lentement.
– Il est mort. Depuis peu…
– C’est le deuxième qu’on retrouve depuis hier, lâcha un autre policier, d’une voix sèche.
Le troisième inspecteur ne dit rien, enfermé dans un mutisme sibyllin depuis qu’ils étaient arrivés sur les lieux du crime. Il fit brusquement demi-tour et rejoignit la voiture sans un mot.
– Qu’est-ce qui lui prend? s’étonna le plus jeune des hommes. Il réagit toujours comme cela devant un mort?
– Peu ou prou, oui, mais il ne faut pas lui en vouloir : ça lui rappelle de mauvais souvenirs… oui, de bien mauvais souvenirs : un immarcescible cauchemar!

Mr Smith rentra dans le petit hôtel et se dirigea vers l’accueil. Une femme se trouvait derrière le comptoir, le téléphone à la main.
– Je te rappellerai, pour te raconter la suite…
Elle fit un grand sourire à l’inconnu qui se trouvait devant elle, troublée par ces yeux céruléens qui la fixaient en silence, puis raccrocha le combiné, sans finir sa phrase. Comme elle se levait, Mr Smith admira ses formes callipyges, et attendit patiemment qu’elle prenne la parole.
– Que puis-je pour vous, Monsieur?
– Une chambre, s’il vous plait.
Elle baissa la tête et se concentra sur son registre, dont elle tourna les pages un peu trop rapidement. Pas de dates, ni de colonnes, ni la moindre esquisse d’un classement, aussi béotien soit-il, dans le registre de la belle dame. Elle se tourna et vérifia les clés disponibles, accrochées sur sa droite. Mr Smith apprécia ce flottement, dans la tenue du registre comme dans le décolleté de la réceptionniste.
– Comment se fait-il, mademoiselle, qu’une femme telle que vous, avec cette ineffable beauté qui illumine tout autour de vous, travaille dans ce petit endroit, derrière ce comptoir cacochyme? »
Elle baissa un peu la tête, les joues roses, les yeux troublés, en lui tendant les clés d’une chambre :
– J’espère, monsieur, que la chambre 18 vous conviendra, et que vous vous plairez chez nous…
Mr Smith était tranquille : elle ne penserait à remplir le registre qu’à la venue des coquecigrues!
– Je me sens déjà comme chez moi, mademoiselle…?
– Julia…
– À bientôt, Julia!
Il grimpa les marches quatre à quatre et mit la clé dans la serrure. La chambre était, sans ambages, très moche. Il s’allongea sur son lit, et sortit une enveloppe de la poche de sa veste. Il l’ouvrit, sans réelle curiosité, devinant ce qu’elle contenait : « John Mike, demain 23h ». Il soupira. Maintenant qu’il était à l’acmé de sa carrière, ce vieux cacochyme lui donnait de plus en plus du travail de médiocre qualité. « Je vais l’occire un jour! » pensa Mr Smith en reposant la lettre sur le lit, un sourire radieux aux lèvres : après tout, assassiner des gens, c’était son métier!

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